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La pyramide de Maslow

La notion de besoins fut initialement développée dans le domaine de la psychologie par Abraham Maslow pour expliquer les processus individuels de motivation (Maslow, 1943). Cette « hiérarchie des besoins humains » consiste en cinq besoins, classés de façon pyramidale : besoins physique (faim, soif, chaleur, sommeil, etc.), besoins de sécurité (protection, ordre, loi, etc.) besoins d‘appartenance et d‘amour (affection, famille, etc.), besoins d‘estime (compétence, respect des autres, reconnaissance) et besoins d‘accomplissement personnel (morale, créativité, résolution des problèmes,…). Le principe-clé de cette théorie est qu‘un besoin supérieur ne peut pas être réalisé si ceux situés en dessous de lui dans la pyramide ne sont pas satisfaits.

Critiques

Cette hiérarchie a été critiquée depuis à de nombreux points de vue. Par exemple, les individus peuvent avoir de l‘affection même si leurs besoins physiologiques ne sont pas entièrement satisfaits. De plus, ce modèle implique que seuls les gens aisés peuvent atteindre les besoins d‘accomplissement personnels, ce qui contredit la réalité de, par exemple, un artiste pauvre qui aurait très bien développé son potentiel individuel. Dans le contexte de la protection de l‘environnement (que ce modèle considère comme un besoin d‘accomplissement personnel) cette hiérarchisation a été utilisée pour justifier la position selon laquelle les pays pauvres devraient d‘abord remplir leurs besoins de base avant de s‘occuper du changement climatique. Ce type de raisonnement tend à légitimer la recherche à tout prix de croissance économique dans les pays pauvres, une stratégie qui n‘est pas partagée par tout le monde, surtout dans une perspective de soutenabilité.

Affinements de Max-Neef

En réponse aux limites de la hiérarchie de Maslow, l'économiste écologique chilien Manfred Max-Neef a créé son propre « modèle de développement humain » visant à construire une théorie des besoins humains pour le développement. Pour Max-Neef, « les besoins fondamentaux des humains sont peu nombreux, finis, classifiables et sont les mêmes dans toutes les cultures et périodes historiques.
Fichier:MaslowPyramid.gif
Figure 1 : La pyramide des besoins de Maslow

(Source : http://www.timlebon.com/maslow.htm)

Ce qui change, à la fois au fil du temps et en fonction des cultures, sont les moyens grâce auxquels ces besoins sont satisfaits ». (Max-Neef, 1991) Neuf besoins fondamentaux sont identifiés (subsistance, protection, affection, compréhension, participation, détente, création, identité et liberté). Bien qu‘il y ait quelques chevauchements entre Max-Neef et Maslow au sujet de leurs catégories de besoins (par exemple la subsistance ressemble aux besoins physiologiques, la protection est similaire au besoin de sécurité et l‘affection est reliée au besoin d‘appartenance), Max-Neef rejette le principe de hiérarchisation et considère les besoins humains fondamentaux comme un système où « aucun besoin n’est le plus important en tant que tel et il n’existe aucun ordre fixe de priorité dans la satisfaction des besoins (par exemple que le besoin A ne puisse être atteint sans que le besoin B ait été satisfait). » (Max-Neef, 1991 : 49)

Le modèle de Max-Neef est composé de deux autres variables (voir le Tableau 1 ci-dessous). Premièrement il existe quatre « catégories existentielles », c'est-à-dire des moyens de satisfaire ces besoins : être (attributs personnels ou collectifs), avoir (institutions, normes et biens matériels), faire (actions personnelles ou collectives) et interactions (positions). La seconde variable a trait aux biens économiques « définis comme des objets ou des artefacts affectant l‘efficacité des catégories existentielles, altérant donc le seuil de réalisation d‘un besoin, que ce soit dans un sens positif ou négatif. » Avec ces variables il est possible de construire une matrice de besoins et de catégories existentielles afin de diagnostiquer le niveau de satisfaction des neuf besoins d‘un groupe ou d‘une société spécifique. Le modèle peut également être utilisé pour déterminer les catégories existentielles requises pour satisfaire les besoins d‘un groupe et, par conséquent, pour concevoir des stratégies pour le développement visant à la réalisation des besoins humains (Max-Neef, 1991).

Doyal et Gough (1991) ont également développé une théorie des besoins humains, considérant leur réalisation comme la précondition d‘une vie comblée. Dans ce modèle, deux besoins universels basiques et deux besoins intermédiaires sont identifiés.

Implications pour la soutenabilité

Ces modélisations récentes des besoins ont des implications pour la théorie du bien-être, au niveau individuel, sociétal et dans l‘économie écologique (Jackson et Marks, 1999). En effet, dans la théorie de Max-Neef, des besoins non satisfaits sont vus comme des pauvretés, étendant ainsi le concept de pauvreté à plus qu‘un simple manque de revenu et au-delà des mesures monétaires. En suivant ce raisonnement, le développement signifie l‘atténuation de multiples pauvretés et devient l‘équivalent social de l‘accomplissement personnel, à la fois au Nord comme au Sud (Dodds, 1997).

De plus, en faisant la distinction entre les besoins basiques et les biens économiques, une conception du bien-être basée sur les besoins remet en question la relation positive entre une consommation matérielle accrue et une satisfaction améliorée des besoins, plus particulièrement les besoins non matériels. C‘est pourquoi cela entre en contradiction avec l‘approche économique conventionnelle qui considère les besoins comme des désirs subjectifs et des préférences qui peuvent être satisfaites par les choix du consommateur. Cette approche remet donc en question la primauté et le rôle unidimensionnel de la croissance économique dans l‘amélioration du bien-être humain. En termes de soutenabilité, cela ouvre la

Table 1 : Modèle de développement humain, Max Neef 2001 (Source: whiteweek.wordpress.com/)

porte à l‘argument selon lequel les impératifs environnementaux ne devraient pas être vus comme des contraintes sur le bien-être humain et que la satisfaction des besoins et le développement n‘impliquent pas forcément un appauvrissement des ressources.

Références:

  • Dodds, S., 1997. Towards a ‗science of sustainability‗: Improving the way ecological economics understands well-being. Ecological Economics, 23, 95-111.
  • Doyal, L., Gough, I., 1991. A Theory of Human Needs , Macmillan, London.
  • Furfari, S., 2007. Le monde et l’énergie. Enjeux géopolitiques, Editions Technip, Paris.
  • Jackson, T., Marks, N., 1999. Consumption, sustainable welfare and human needs- with reference to UK expenditure patterns between 1954 and 1994. Ecological Economics, 38 (3), 421-441.
  • Maslow, A., 1943. A Theory of Human Motivation. Psychological Review, 50 (4), 370-96.
  • Max-Neef, M., 1991. Human Scale Development. Apex Press, New York.

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