Jean Gadrey
Jean Gadrey, né en 1943, est un économiste français spécialiste des services. Il est professeur émérite à l'Université de Lille I. Critique de la théorie économique néo-classique dominante en sciences économiques et du « néolibéralisme », il se consacre, depuis quelques années, à des recherches sur les indicateurs de richesse et les limites de la croissance économique. Il est notamment membre du Conseil scientifique de l'organisation altermondialiste ATTAC. Outre ses articles et livres scientifiques, il a publié de nombreux articles dans des revues de vulgarisation comme Alternatives économiques, ou dans les journaux Le Monde et Politis.
Travaux théoriques
Jean Gadrey est un spécialiste reconnu des services en France. Il a été pendant dix ans président de la formation « Commerces-services » du CNIS qui définit les grandes orientations des statistiques menées dans ce domaine. Il est en particulier l'auteur d'un « Repères » sur la socio-économie des services, d'un livre sur le mythe de la Nouvelle économie et d'un chapitre critiquant l'idée reçue selon laquelle « Il faut développer les petits emplois de service à faible productivité, comme le font les Américains ».
Jean Gadrey a réalisé au début des années 2000 une série de travaux critiques sur les indicateurs de richesse. Il a en particulier critiqué les aspects jugés absurdes de l'indicateur économique dominant qu'est actuellement le Produit intérieur brut, par exemple dans le livre collectif écrit en anglais et rassemblant des textes d'économistes critiquant le néoliberalisme. Sur ce thème, il a réalisé et publié récemment de nombreux travaux en collaboration avec sa collègue Florence Jany-Catrice.
Quand le président français Nicolas Sarkozy a proposé le 8 janvier 2008 de mettre en place une commission présidée par le prix Nobel Joseph Stiglitz afin de développer une « réflexion sur les moyens d'échapper à une approche trop quantitative, trop comptable de la mesure de nos performances collectives » et d'élaborer de nouveaux indicateurs de richesse, Jean Gadrey a commencé par dénoncer les ambiguïtés de ce projet. Mais, ayant obtenu des assurances quant à l'indépendance de ces travaux et à leur ouverture vers les contributions de la société civile, il a finalement accepté la proposition de Jean-Paul Fitoussi de collaborer aux travaux de cette commission en compagnie de quatre prix Nobel et d'une vingtaine d'autres économistes.
Activités militantes
Jean Gadrey a été membre du comité des 12 économistes pour le non au projet de Traité constitutionnel et a animé de nombreuses conférences sur le sujet. Il a notamment écrit à ce propos l'article « Conditions de travail, fonds structurels, services publics : Le virage néo-libéral des années 1990 en Europe » : après une critique largement documentée, il reprend dans l'annexe le projet d'une Europe sociale à construire.
Il a participé à l'amélioration et à la diffusion de l'indicateur des inégalités en France dit BIP 40 (contraction de l'inverse du sigle PIB et du CAC40) et est toujours membre du comité de rédaction du site qui en assure la diffusion. Plus généralement, il privilégie dans ses analyses la dénonciation du développement des inégalités, aussi bien dans de nombreux articles de Alternatives économiques ou de Politis que dans son livre de 2006 sur "la fin des inégalités" ou dans l'ouvrage collectif dont il a coordonné la rédaction en 2005-2006 dans un groupe du Conseil scientifique de ATTAC.
Jean Gadrey remet en cause la religion de la croissance, laquelle met selon lui gravement en danger la planète du fait de ses effets sur l'environnement, sans augmenter de manière notable le bien-être à partir d'un certain niveau de richesse matérielle par habitant. Bien que critiquant par plusieurs aspects les thèses de la décroissance, il recommande une vision alternative à l'idéologie économiste répandue qui considère la croissance comme le moyen obligé du plein-emploi et comme un objectif incontournable.
Ayant accepté, malgré ses fortes réticences initiales, de participer à la commission Stiglitz chargée de réfléchir aux meilleurs indicateurs de bien-être, Jean Gadrey a lancé avec quelques amis dont Florence Jany-Catrice, Dominique Méda et Patrick Viveret un groupe de réflexion chargé de socialiser la réflexion alternative sur ce sujet. Ce groupe s'est intitulé Forum pour d'autres indicateurs de richesse (ou FAIR. Il se réunit parallèlement à la Commission Stiglitz et a vocation à impulser le débat collectif sur le problème de la mesure, et donc de la définition, du progrès. Parmi ses premières manifestations, il faut noter la réunion à l'Assemblée nationale d'une "rencontre" ayant pour titre "Enjeux démocratiques d’une nouvelle approche de la richesse : de nouveaux indicateurs, oui, mais comment et pour quoi faire ?".